Ecolo et les Frères 3 : le CCIB ou comment le parti a fait monter l’islamisme au parlement.

Image par hosny salah de Pixabay

Au cours de sa campagne des communales (la Belgique vote demain), Ecolo est en pointe du combat pour une « Palestine libre ». Au point de distribuer des autocollants « free Palestine » signés Ecolo-Groen. Le parti résiste aussi à l’interdiction de l’abattage rituel sans étourdissement et manœuvre depuis des années dans les communes, les régions et l’État pour y autoriser le port du voile pour les fonctionnaires. Toutes choses qui ressemblent fort aux combats des Frères musulmans. Il faut dire que le parti s’est rapproché de l’équivalent belge du CCIF, le CCIB (devenu depuis le CIIB). Au point où l’on ne sait plus bien si c’est le CCIB qui a noyauté Ecolo ou l’inverse.

Voici comment le parti vert belge a fait la courte échelle aux Frères musulmans.

Dans les deux épisodes précédents (1 : de Taizé à Sidi-Josse) (2 : Zoé, Zakia, Zibouh), j’ai montré que les liens entre islamistes et écologistes se croisent et se multiplient. On y parlait notamment de Fatima Zibouh, la voilée chic du parti. On la retrouve dans Tayush, un groupe de « dialogue intercommunautaire entre juifs et musulmans » sous l’égide d’Henri Goldman, meneur aussi discret qu’efficace, et l’un des piliers de « l’islamogauchisme » et du palestinisme chez Ecolo.

Né en 1947, ce surdoué de la militance politique était à 20 ans déjà l’animateur de l’Union des Jeunes Juifs progressistes (aujourd’hui UPJB). Il a dirigé l’organisation de 1967 à 1972. On le croisait alors aussi à la Ligue révolutionnaire des Travailleurs (trotskiste) ou encore, dans la Jeune Garde socialiste.

Goldman saque

En bon trotskiste (bien qu’inclassable en réalité), il a ensuite importé sa vision originale du marxisme chez Ecolo, notamment en tant que secrétaire régional bruxellois. Dans les années 90, alors que le parti tenait à sa ligne laïque, Henri Goldman a patiemment œuvré à le tirer très à gauche, dans le camp  « anticapitaliste », et contre le canal historique laïque et politiquement plus neutre incarné par Jacky Morael. En 1994, Goldman et Morael croisaient d’ailleurs le fer et la plume à ce sujet dans Les Cahiers du Marxisme. Le premier a fini par gagner dans les faits.

Selon un ancien du parti, Goldman se serait ensuite mis à « cornaquer un petit groupe militant interne, tous fanatiquement pro-voile ». Fatima Zibouh faisait partie de ce petit groupe très actif qui n’hésitait pas à exclure d’office les laïques d’Ecolo de leurs réunions, selon mon interlocuteur.

Ce groupe interne était étroitement lié à Tayush, le think tank d’Henri Goldman, qui œuvra, dès le début de la dernière décennie, à lutter contre « l’islamophobie ». Traduisez : l’interdiction du port du voile dans certaines fonctions. Outre Goldman, Tayush réunissait une majorité d’écolos, comme Mustapha Chairi, Hajib El Hajjaji, Farida Tahar, Khaddija Haourigui, Tamimount Essaidi, Marie Fontaine, François Haenecour, Mathias El Berhoumi. Et bien sûr, l’incontournable Fatima Zibouh. 

De Tayush au CCIB

Mais surtout, ce réseau en préfigurait un autre, puisque les quatre premiers cités sont aussi les principaux membres fondateurs du Collectif contre l’Islamophobie en Belgique (CCIB, aujourd’hui rebaptisé CIIB). Au point qu’il est difficile de distinguer Ecolo d’une des antennes fréristes belges les plus efficaces au plan politique.

Fondé en 2014, le CCIB est, de son propre aveu, l’équivalent belge du CCIF aujourd’hui dissous en France. En bon frère, il a d’ailleurs vivement critiqué cette dissolution, « islamophobe ». Pourtant, le décret gouvernemental français qui signait la fin de l’organisation était bien charpenté. Il lui reprochait de présenter comme « islamophobes » des mesures antiterroristes comme la fermeture d’une mosquée servant de centre de recrutement de jihadistes, ou l’interdiction d’une manifestation en soutien à un imam qui avait prêché la lapidation des femmes, une méthode, selon lui, de « purification ».

Le décret relevait aussi que le CCIF entretenait de « nombreuses relations » avec des islamistes radicaux et des djihadistes ayant notamment « combattu en Syrie dans les rangs d’Al-Qaeda ». À cela s’ajoutaient les liens avec l’association Barakacity « et [à] son président, alors même que ce dernier a soutenu le terrorisme, la mort en martyr et les attentats contre Charlie Hebdo ».

Plusieurs des dirigeants du CCIF étaient en outre décrits comme « les tenants d’une approche radicale de la religion musulmane pouvant être qualifiée d’islamiste », ayant relativisé ou refusé de condamner, par exemple, les attentats terroristes de Mohammed Merah ou de Mehdi Nemmouche.

C’est donc ce panier de crabes proterroriste que le CCIB (mais aussi Enar) a soutenu.

Mieux : le CCIB et le CCIF partageaient le même logo et la même ambition. Outre une proximité évidente avec les Frères musulmans, comme le relevait Marie-Cécile Royen dans Le Vif, sur base d’une source officielle sécuritaire belge : « le CCIB est connu pour ses liens étroits avec les Frères musulmans. D’un point de vue structurel, certains administrateurs du CCIB sont actifs dans les organisations belges des FM. »

Frériste dès avant sa naissance

Le CCIB était en fait la concrétisation d’une initiative précédente. En 2012, ses futurs président et vice-président, Mustapha Chairi et Hajib El-Hajjaji, avaient lancé Muslims Rights Belgium (MRB), une première antenne censée lutter contre « l’islamophobie ». C’est un troisième larron, Fouad Benyekhlef, qui avait « officiellement » pris les destinées de l’association en main. Il était, selon le journaliste Philippe Brewaeys, « une figure centrale du Complexe éducatif et culturel islamique de Verviers (CECIV) », d’obédience Frères musulmans — on y reviendra. 

L’inauguration de Muslim Rights Belgium se fit en présence de l’incontournable Marwan Muhammad (déjà rencontré dans l’association EMBEM de Fatima Zibouh, aux côtés d’Hajib El-Hajjajai), qui était alors porte-parole du CCIF, dont MRB se réclamait déjà, comme le montre le graphique ci-dessous, publié dans le premier « rapport » de l’organisation.

 

On y constate que MRB s’associait au CCIF et à l’une de ses émanations, IMAN, qui réunissait le CCIF et FEMYSO, la section jeune des Frères musulmans européens. Le CCIB s’y affiliera d’ailleurs plus tard. Ce projet était soutenu en dépit du plus élémentaire bon sens par… l’Union européenne.

Le MRAX (Mouvement contre le Racisme, l’Antisémitisme et la Xénophobie) faisait également partie du lot. On le voit même très proche du MRB sur le graphique. Et pour cause : l’association antiraciste, créée après la guerre pour lutter notamment contre l’antisémitisme, avait été noyautée en 2009 lors d’un véritable « putsch » islamoïde réunissant des écolos (dont l’actuelle ministre bruxelloise Barbara Trachte), des frères musulmans (comme Michaël Privot), des antisémites (comme Nordine Saïdi ou encore l’organisateur des spectacles de… Dieudonné).

Parmi les 75 auteurs de cet étonnant coup d’État visant notamment à étouffer la lutte contre l’antisémitisme au sein de l’organisation, l’on retrouvait la future cofondatrice du CCIB Farida Tahar, ainsi que Fatima Zibouh, et d’autres proches de Tariq Ramadan. L’association a depuis été remise sur les rails par Carlos Crespo.

Tout en haut du graphique figurait ENAR, qui deviendra un partenaire européen incontournable en matière de « racisme » et bien sûr, « d’islamophobie », tout en comptant, parmi ses membres, l’élite européenne des Frères musulmans : la FIOE (coupole européenne des FM, soupçonnée aussi d’être liée au Hamas), Femyso (aile jeunesse) et EFOMW (aile féminine). ENAR fut évidemment aussi en pointe pour « défendre » le CCIF dissous en France.

L’islam endogène en… Europe

L’autre intérêt de ce graphique est qu’il montre les ambitions politiques de l’embryon du CCIB : intégrer le Centre Interfédéral pour l’Égalité des Chances et contre le Racisme (désormais rebaptisé UNIA) ainsi que le ministère de l’Égalité des Chances. Toutes ces administrations sont cruciales pour faciliter la propagation du voile islamique dans les services publics. 

On verra que le CCIB concrétisa cette ambition grâce à Ecolo. Tout comme il parvint à atteindre un autre objectif fixé par MRB dans son premier rapport : « Dénoncer les unes de journaux ou de magazine exposant l’islam ou les musulmans de façon anxiogène ». D’abord, en collaborant activement avec l’Association des Journalistes professionnels belge (AJP), ensuite au niveau européen via la Fédération européenne des Journalistes. Les médias qui ne respecteraient pas ces critères seraient étiquetés « islamophobes ».

Enfin, en matière d’éducation, MRB se promettait « [d’]inscrire dans les manuels scolaires la contribution de l’islam à la construction de l’Europe pour lutter contre la vision binaire d’un islam exogène ». L’islam serait donc endogène en Europe… Je vous laisse réfléchir là-dessus.

Dans les deux organisations, l’outil le plus utilisé pour poser les musulmans fondamentalistes en victimes était le voile islamique, ce qui correspond bien à la stratégie des Frères musulmans telle que décrite, déjà, en 2001 par le Comité R (rapporteur de la Sûreté de l’État) : populariser, voire généraliser le port du voile, vecteur et symbole de l’islam rigoriste. Tout en l’affirmant comme « un choix » alors même que le centre de la Fatwa des Frères musulmans européens le présente, lui, comme « une obligation légale pour toute femme en âge de procréer ». Les Jésuites sont battus par forfait !

Qui entre chez qui ?

Le 9 septembre 2014, le CCIB dépose ses statuts au greffe du tribunal de commerce. Sur les sept membres fondateurs, trois seulement n’étaient pas (ou ne deviendraient pas) membres ou mandataires Ecolo. Pour les autres : le président, Mustapha Chairi, était membre du secrétariat local d’Ecolo de la ville de Bruxelles et candidat malheureux aux élections fédérales d’avril 2014. Le vice-président, Hajib El-Hajjaji, était conseiller communal et bientôt provincial Ecolo. La première vice-présidente, Khaddija Haourigui, était militante écologiste. Et la seconde vice-présidente, Farida Tahar, qui était conseillère communale socialiste au moment de la création du CCIB, passa chez Ecolo en 2018.

En septembre 2015, le CCIB organisait son premier gala, visant à récolter des fonds (dont on ne connaîtra jamais le montant), en présence de représentants de la plupart des partis francophones, dont une forte délégation écolo, menée par Zakia Khattabi, alors fraîchement élue coprésidente. La méthode : une vente aux enchères dont on ne connut pas les donateurs. L’un deux remit même, après paiement, son acquisition en vente !

Il y avait là aussi Fatima Zibouh et Mahinur Özdemir (récemment virée des Engagés), ainsi quelques autres proches connu(e)s des Frères. Le repas était halal, l’alcool proscrit. Hormis les politiques, la plupart des femmes étaient voilées, dont beaucoup en abaya. Au CCIB, on ne peut apparemment se défendre de « l’islamophobie » qu’en pratiquant l’islam à la lettre, et pourquoi pas, rigoriste !

Les ambitions fréristes

En 2001, le Comité R a présenté un rapport au Sénat qui décrivait notamment les objectifs des Frères musulmans, qui correspond bien à la dynamique du CCIB : « ils tentent de prendre le contrôle d’associations […] et d’organisations pouvant s’ériger en interlocuteurs privilégiés des autorités nationales, voire européennes […] Dans ce contexte, ils tentent d’imposer, au sein des organes représentatifs, la désignation de personnes influencées par leur idéologie. » 

Pour cela, les Frères musulmans encouragent leurs membres à entrer en politique, dans le but de contrer la laïcité et d’insuffler quelques bases de la charia dans la législation. On parle surtout de l’abattage rituel sans étourdissement, même réversible, du droit au port du voile dans l’enseignement, y compris pour les enseignants, ainsi que dans toutes les fonctions administratives. Mais l’interdiction progressive du droit au blasphème ou le retrait des cours d’éducation sexuelle à l’école sont d’autres ambitions qui se manifestent plus timidement, parce que plus difficiles à justifier dans les partis où les Frères pratiquent l’entrisme, principalement Ecolo, le PS, le PTB et, autrefois, Les Engagés. 

Les femmes sont, elles, également encouragées à se lancer en politique par les Frères musulmans, mais pour autant — selon une fatwa ad hoc — que cela ne perturbe pas leur fonction fondamentale d’épouse et de mère, et que l’engagement soit au service de la Confrérie. 

Et la pépinière CCIB a un comportement qui correspond bien à ces directives.

Hajjaji a agi

Ainsi, le cofondateur du CCIB qui avait le plus d’accointances visibles avec les Frères musulmans (dès lors que c’est une société secrète, il est impossible de savoir qui l’est officiellement) était le Verviétois Hajib El-Hajjaji. C’est aussi celui qu’Ecolo servit le mieux, en le faisant entrer au Conseil d’Administration d’Unia, le Centre interfédéral pour l’Égalité des Chances, dont MRB souhaitait, six ans plus tôt, faire un partenaire…

Comme pratiquement tous les autres membres fondateurs du CCIB, Hajib El-Hajjaji est passé par la voie politique. Au départ, il officiait au CDH (parti centriste devenu Les Engagés) à Verviers, en compagnie de Layla Azzouzi, sa suppléante. 

Mais après que le CDH a exclu cette dernière parce qu’elle refusait de retirer le voile aux séances publiques de l’Action sociale, Hajib El-Hajjaji est passé chez Ecolo, et Layla a pris sa place au Conseil communal comme indépendante, toujours voilée bien entendu. Elle est depuis devenue l’une des chevilles ouvrières du… CCIB !

Layla Azzouzi a, elle aussi, été pour le moins en contact avec les Frères musulmans, puisqu’elle a été volontaire dans leur mouvement de jeunesse FEMYSO. Et qu’elle a collaboré avec l’European Muslim Network (EMN) de Tariq Ramadan, copieusement financé par les charités fréristes du Qatar. À la déchéance du prédicateur-violeur, l’EMN fut repris par Ibrahim El-Zayat, que l’Allemagne considère comme le délégué principal des Frères musulmans en Europe et qu’Egypt Today décrit comme : « Une personnalité des Frères musulmans européens, qui a servi dans de nombreuses organisations islamiques en Europe et en Arabie saoudite. »

Si Layla Azzouzi n’est pas « chez » Ecolo, elle partage volontiers les messages du parti sur ses réseaux sociaux.

Un fameux pedigree

Le pedigree frériste d’El Hajjaji est bien plus impressionnant encore. Il a été membre cotisant de la LMB (Ligue des musulmans de Belgique) que la Sûreté de l’État belge rattache sans réserve aux Frères musulmans. En 2014, la LMB recevait 1,2 million de fonds de charités du Golfe, pour moins de 7.000 euros de cotisations propres (Christian Chesnot et Georges Malbrunot, in Qatar Papers). Le donateur le plus généreux était Qatar Charity à travers laquelle « Doha a dépensé de vastes sommes d’argent pour les projets associés aux Frères musulmans européens ». 

Hajib El-Hajjaji était également administrateur du Complexe éducatif et culturel Islamique de Verviers (CECIV), qui se réclamait lui aussi de la Ligue des musulmans de Belgique. Le CECIV se référait de plus spécifiquement à la charte des Frères musulmans européens émise par la FIOE, coupole incontestée du mouvement, dont le fondateur, Youssef El-Qaradawi se targuait ouvertement de finir le travail d’Hitler d’éradication des Juifs. 

Le CECIV comptait parmi ses autres administrateurs l’ex(?)-frère musulman avoué Michaël Privot ainsi que Julie Pascoet, respectivement directeur et Senior Advocacy officer d’ENAR, le partenaire européen du CCIB que, tiens, revoilà.

L’argent s’Hamas. 

Même le fait qu’Hajib El-Hajjaji ait été impliqué, via un oncle, dans l’association « caritative » internationale Al Aqsa, (devenue Askahum), elle aussi liée aux Frères musulmans, et soupçonnée de financer le Hamas, n’a jamais gêné le parti écologiste. Pourtant, les succursales néerlandaise et allemande de la même fondation, dirigées par un même président, ont été fermées par ces pays, et leurs biens saisis. En Belgique, elle a juste changé de nom.

Hajib El-Hajjaji se défend bec et ongles de tout lien avec les Frères musulmans, notamment dans ce droit de réponse adressé en 2018 au Vif, où il n’hésite pas à accuser la journaliste Marie-Cécile Royen d’acharnement et de « mauvais journalisme ». Mais il n’y présente aucun élément contre les accusations portées contre lui. Et pour cause, tout est factuel !

En tout cas, une fois parachuté chez les Ecolo, Hajib El-Hajjaji a pu compter sur le soutien indéfectible des co-président(e)s successifs pour monter les échelons. D’abord, celui de Zakia Khattabi et ensuite, de ses successeurs (Rajae Maouane et Jean-Marc Nollet). Il obtint en 2019 une place sur la liste provinciale, où il fut élu. Il fut bombardé chef de groupe Ecolo dans sa commune, au grand dam de conseillers plus anciens du parti. Puis administrateur chez Unia et Myria. En 2024, il fut élu député, et aussitôt désigné sénateur par le duo Maouane/Nollet.

Lorsque la journaliste du Vif Marie-Cécile Royen, publia un article robuste sur sa nomination comme chef de groupe, Hajib El-Hajjaji alla déposer plainte au Conseil de Déontologie journalistique en compagnie de Zakia Khattabi, du parti Ecolo et… de la Ligue des Musulmans de Belgique frériste ! Zakia Khattabi fut déboutée. Détail piquant, à ce moment-là, elle était devenue ministre fédérale belge du Climat.

Mais quand même. Croiser une coprésidente d’Ecolo dans une même plainte que les Frères musulmans « officiels », ça farte…

Ceciv vrai.

Du vice-président du CCIB, passons à son ex-président et actuel directeur, Mustapha Chaïri. Lui, c’est un soutien de l’ex-président égyptien et Frère musulman Mohammed Morsi. C’est aussi un habitué de la rabi3a, signe de ralliement des Frères musulmans, né lors de la répression de la place Rabia, au Caire. Il s’est ainsi fait prendre en photo avec ses fils, tous avec le pouce replié et 4 doigts tendus — c’est la rabi3a (qui signifie « quatre »). 

Interpellé par Fadila Maaroufi (Observatoire des Fondamentalismes) sur la chaîne Almouwatin, Moustapha Chairi a commencé par affirmer que l’islam politique n’existait pas « dans un contexte belgo-français ou européen » — toutes les sûretés européennes disent le contraire.

Quant à son usage de la rabi3a, il le justifia d’abord en affirmant que « cette nuit-là [du massacre de la place Rabia], l’armée égyptienne a massacré presque 4.000 personnes […] parce qu’ils revendiquaient une place qui s’appelle Rabia, c’est honteux […] ». Avant de changer de ton pour se justifier : « on m’a volé une photo sur Facebook (sic) parce que j’étais comme ça [il fait la rabi3a] avec mes 4 garçons, parce que je mariais mon quatrième fils et on était juste comme ça pour dire : c’est le quatrième fils qu’on marie ». 

Ou comment se trahir en voulant se défendre : la rabi3a représente effectivement le chiffre 4. Mais Mustapha Chairi n’a pas seulement fait ce geste lors de ce mariage. Il a même porté un t-shirt arborant la rabi3a lors d’une « sortie »

Ensuite, sur sa première justification, le chiffre de 4.000 morts est conforme à la thèse des seuls Frères musulmans. Ils étaient 638 selon le pouvoir égyptien (dont 43 policiers) et 800 selon Amnesty International. Il peut bien sûr être outré par la répression sans pour autant se sentir proche des FM, mais dans ce cas, pourquoi être aussi proche, par exemple, de FEMYSO au point, plusieurs années durant, de partager leurs locaux ?

Comme Hajib El-Hajjaji, il s’est toujours défendu d’être frère musulman !

Sœurs musulmanes

La troisième personnalité écologiste issue du CCIB (ou l’inverse) est son ex-vice-présidente Farida Tahar. Alors qu’elle était déjà membre de Tayush, elle est entrée officiellement chez Ecolo après que le PS lui a refusé de faire campagne avec son voile sur la tête. Comme l’autre vice-présidente et cofondatrice, Khaddija Houarigui, c’est une ancienne élève (à l’âge adulte) d’Alkayria Belgica, une école fondamentaliste d’inspiration frérosalafiste (cet article d’Ikhwan info est encore plus détaillé sur les liens présumés de l’école avec les frères musulmans). Où l’on voile les petites filles de cinq-six ans pour la prière du vendredi. 

Farida Tahar nie elle aussi tout lien avec l’islamisme. Pourtant, dans sa campagne électorale de 2019, elle a notamment critiqué un projet de loi du député MR (libéraux conservateurs) Richard Miller qui, selon elle, « consistera à exiger que la connaissance scientifique ne pourrait (sic) pas être remise en cause […] dans les écoles ». Le projet visait en effet à empêcher l’entrée à l’école de thèses théologiques comme le créationnisme. Farida Tahar voulait-elle, au contraire, lui ouvrir les portes de l’enseignement ?

Dès le début de l’existence du CCIB, Farida Tahar s’était d’ailleurs aussi émue du « danger » de la laïcité. Il faut dire qu’elle est aussi proche de la première députée voilée belge, la sœur musulmane Mahinur Özdemir, aujourd’hui ministre de la famille dans le gouvernement turc. Une erdoganienne assumée.

Le génocide était (déjà) palestinien

En 2015, sur X (alors encore Twitter), Farida Tahar a ainsi vigoureusement protesté contre l’éviction de Mahinur du CDH pour avoir nié le génocide arménien : 

« Soutien total à Mahinur Özdemir. Le CDH avait besoin d’un « bon » prétexte pour exclure (enfin) sa députée régionale! Quelle belle hypocrisie! ». 

Alors qu’on l’interpellait sur la cause de cette exclusion, Farida répondait qu’elle reconnaissait « tous » les génocides et citait parmi eux le… « génocide palestinien ». Un autre aspect du frérisme : le palestinisme. Et au passage, le rappel que ces gens accusaient Israël de génocide bien avant l’offensive post 7 octobre à Gaza !

Parmi les autres personnalités Ecolo qui s’étaient alors émues de l’exclusion de la « négationniste » Mahinur Özdemir, citons Rajae Maouane, qui avait twitté « Soutien à Mahinur Özdemir, victime d’une chasse aux sorcières et d’un acharnement #indignationsélective #cdh ». Rajae deviendra à son tour… coprésidente Ecolo, en 2019.

Comme Hajib El-Hajjaji, Farida Tahar obtint une bonne place sur la liste Ecolo de cette année-là et fut élue députée. Pour être rapidement bombardée cheffe de groupe et… sénatrice. Elle fut ainsi la première femme voilée à entrer au Parlement fédéral (national, donc) dans le sillage dessiné par son amie Mahinur Özdemir au Parlement régional.

Ecolo la plaça ensuite à la commission de l’Égalité des Chances. Encore une place stratégique pour faire pénétrer la stratégie des Frères musulmans, en particulier sur le voile.

Petit détail : dans sa déclaration de mandats, Farida Tahar a tout de même « oublié » de préciser qu’elle était administratrice et vice-présidente du CCIB.

Ecolo, aspirateur de voilisme

Enfin, si la première vice-présidente et cofondatrice du CCIB, Khaddija Haourigui, n’est pas montée dans un parlement, elle n’a pas été oubliée non plus, puisqu’elle est actuellement « Attachée aux relations société civile et associative » dans le cabinet (désormais en affaires courantes) de Zakia Khattabi, la ministre fédérale du Climat, de l’Environnement, du Développement durable et du Green Deal.

Le parti Ecolo a donc aspiré plus de la moitié du Conseil d’Administration du CCIB, et leur a fait la courte échelle. Tout comme il l’avait fait pour la ramadanienne Fatima Zibouh en 2011. Aujourd’hui, celle-ci s’occupe de la diversité au sein du « Pôle emploi » bruxellois, Actiris. Encore une place de choix pour généraliser le port du voile chez les musulmanes.

Le CCIB s’est aussi rapidement institutionnalisé et a pu compter sur le soutien de multiples institutions, dont le Centre pour l’Égalité des Chances (Unia — où Hajib El-Hajjaji siège désormais) ou la Fédération Wallonie-Bruxelles — l’une des six composantes du fédéralisme belge, qui représente les Francophones de Belgique.

En mai 2021, la Secrétaire d’État (Ecolo) Sarah Schlitz tentait à son tour de faire « monter » une autre personnalité voilée proche des Frères musulmans, mais aussi de Farida Tahar, de Fatima Zibouh et de la sœur musulmane Mahinur Özdemir. Il s’agissait d’Ihsane Haouach.

Cette dernière, amie personnelle du leader des Frères musulmans belges selon la Sûreté de l’État, fut bombardée « commissaire du Gouvernement » auprès de  l’Institut pour l’Égalité des Femmes et des Hommes, une institution fédérale. L’égalité des femmes passerait donc par le port du voile !

Pour une fois, l’entrisme finit en eau de boudin. Le tollé provoqué par cette nomination, les déclarations erratiques d’Ihsane Haouach sur la démocratie et la fuite d’un rapport de la Sûreté de l’État mirent rapidement fin à l’aventure.

La même secrétaire d’État Ecolo Sarah Schlitz, interrogée au Parlement sur la reformation du CCIF en Belgique sous le nom de CCIE, confondit CCIE et CCIB et déclara qu’elle n’allait pas considérer toute organisation islamique comme suspecte. Même pas celles, donc, qui sont mêlées à des imams qui justifient la lapidation des femmes. Il est beau, le néoféminisme.

Finalement, Sarah Schlitz fut démise pour mensonge et fut remplacée par Marie-Coline Leroy. Une autre Ecolo. Qui coupa les vivres au Conseil des Femmes Francophones, le « parlement des femmes », né en 1905. Les premières attaques envers le CFF étaient venues de Zakia Khattabi quelques années plus tôt.

En Belgique, par la grâce d’Ecolo, le voile islamique a donc prétendu avoir raison du féminisme historique. Heureusement, les écologistes ont été écartés du pouvoir aux élections de juin 2024, suite à la victoire de la droite.

Reste à espérer qu’ils seront aussi écartés dans les communes où ils prônent le port du voile dans les services publics. Mais là, rien n’est sûr. Un autre islamisme, plus décomplexé encore, se profile. Celui de la Team Fouad Ahidar.

Tant que vous êtes là…


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