Affaire Hendrik Vuye : la N-VA sera nationaliste ou ne sera plus.
Coup de tonnerre à la N-VA, Bart De Wever a dégradé Hendrik Vuye, l’un des théoriciens de l’indépendance flamande, qu’il avait auparavant chargé d’étudier les moyens de préparer le confédéralisme en lui confiant le projet Objectief-V qui visait à « créer une large plateforme autour du confédéralisme et [à] poser les jalons de l’émancipation flamande. » L’objectif final : que chaque région se débrouille financièrement. Le site est désormais inaccessible, ce qui permet de mesurer l’ampleur de la gifle bartienne. La réaction du Leider n’a pas plu à Hendick Vuye ni à sa proche collaboratrice, Veerle Wouters, qui ont quitté le parti en milieu de semaine.
Du coup, un certain nombre d’observateurs ont cru pouvoir annoncer que la N-VA cessait d’être un parti nationaliste, voire qu’elle devenait belgicaine, ce vieux délire qui permet de la classer parmi les partis « normaux » et d’évacuer à bon marché tout soupçon de xénophobie ou de proto-fascisme envers l’organisation nationaliste, une sorte de médicament à effet immédiat pour quelques Francophones qui pensent guérir de cette manière leur sentiment de culpabilité pour tout ce qui a été fait aux Flamands par le passé.
Grossière erreur : la colère de Bart ne signifiait pas que le parti était devenu moins nationaliste. Au contraire, il se rapportait à la figure du leader, cet autoritarisme qui motorise le nationalisme et lui donne un visage. Ce que Bart De Wever n’a pas supporté, c’est que Vuye et Wouters critiquent publiquement l’idée de relancer une suédoise en 2019 et donc, de remettre le communautaire au frigo. Bart l’a pris pour une baffe donnée à la stratégie N-VA. Et il y avait récidive : Hendrik Vuye avait auparavant porté sur la place publique une autre discussion interne, sur le burkini. Inacceptable !
Si une telle indépendance d’esprit est possible, voire souhaitable, dans la plupart des partis, à la N-VA, on peut bien côtoyer des fascistes authentiques le dimanche de la Veillée de l’Yser sans que le Mamamouchi ne moufte, mais on ne peut pas critiquer le patron !
Un électeur autoritaire, répressif et ethnocentrique
Certes, seule une minorité d’électeurs de la N-VA est ouvertement séparatiste (17 %). Et certes, la question flamande a été une des raisons prépondérantes de voter N-VA pour seulement 11 % de ses électeurs en 2014 (réponse spontanée, plusieurs choix possibles, étude KUL sur le comportement des électeurs). Mais, à titre de comparaison, l’indépendance n’était citée comme raison de leur choix que par 6 % des électeurs du… Vlaams Belang ! Ce dernier attire plutôt massivement ceux qui s’inquiètent de la « question migratoire » (42 % des fournisseurs de voix du VB ont cité ce thème comme prépondérant dans leur choix contre seulement 4 % à la N-VA !) Autrement dit, la N-VA est à ce jour toujours le parti flamingant par excellence.
Mais elle n’est évidemment pas que cela. Comme raisons de voter N-VA, en 2014, c’était surtout « le changement » qui était le plus souvent invoqué dans cette étude — 44 % des électeurs N-VA se disaient donc logiquement mécontents à très mécontents du gouvernement Di Rupo. Le PS-bashing a de toute évidence très bien marché. Pour le reste, l’électeur N-VA était préoccupé, dans l’ordre d’importance, par l’emploi, la santé, les pensions, les impôts, l’économie et l’intégration, tout ça loin devant la question flamande. Un électeur « normal », donc ? Si c’était le cas, pourquoi Bart De Wever aurait-il pris la peine d’attaquer de front les Francophones pour rassurer ses troupes ?
Car penser qu’on peut évacuer le nationalisme de la N-VA sur cette base (11 % d’électeurs), c’est nier le buikgevoel flamand. Autrement dit, le fait qu’il n’est pas nécessaire de cadrer le choix partisan dans un profil flamand exprimé, il l’est d’office pour un bon tiers des votants au Nord. Et la typologie de l’électeur de la N-VA le présente comme plus individualiste, autoritariste, répressif, ethnocentrique et anti-belge que celui de n’importe quel autre parti, hormis le Vlaams Belang.
À noter que l’électeur N-VA est aussi nettement plus progressiste sur les questions éthiques que le Vlaams Belang, mais aussi bien plus que le CD&V ou même le SP.a socialiste !
Face à son électorat plus large que celui de la Volksunie, et donc plus bigarré, l’ADN de la N-VA n’a pourtant pas fondamentalement changé, ni avant ni après l’affaire Hendrik Vuye. Le parti a simplement adapté son discours. Comme je le disais, l’idée d’une nation flamande ne se limite pas aux 11 % de passionnés qui l’ont exprimée : elle va de soi dans une région que le CVP a dotée d’une mythologie, d’un drapeau omniprésent, d’un hymne national et d’une fête tout aussi nationale. Autrement dit, la « cause flamande » n’est plus dans la conscience politique, elle est passée dans le subconscient ou, mieux encore, dans l’ADN politique de l’électeur.
L’autoritarisme (figure du chef incarnée par Bart « Auguste » De Wever), mais surtout l’ethnocentrisme, et l’anti-belgicisme, trois caractéristiques plus répandues chez l’électeur N-VA qu’ailleurs, sont donc aussi alimentés par l’idée, en filigrane, que le parti sert la Flandre et les Flamands, point. C’est d’ailleurs l’un des arguments massue assénés par Bart De Wever pour clôturer la crise « Hendrik ». Il l’a fait dans cette lettre ouverte intitulée Mettre le confédéralisme en route (Werk maken van confederalisme) et publiée sur le site de la N-VA(1)
Une lettre flamandissime qui déstabilise le MR
Il y rappelle que « la N-VA est et reste un parti nationaliste-flamand. Depuis notre fondation, nous travaillons à l’indépendance flamande et, élection après élection, nous convainquons toujours plus de Flamands […] Début 2014, des milliers de membres de la N-VA […] ont approuvé le confédéralisme : la Flandre et la Wallonie prennent chacun leur propre chemin et décident ensemble ce qu’elles veulent encore faire en commun. » Il s’agit donc bien d’un confédéralisme véritable, au contraire de celui prôné par le CD&V : la N-VA veut la séparation des deux grandes entités linguistiques et une mise en commun de quelques prérogatives, en cas d’accord (et donc d’aucunes en cas de désaccord). Or, toutes les expériences confédérales ont tourné court assez vite (la Suisse n’étant pas un pays réellement confédéral). La dernière en date était la CEI née après la chute de l’Union soviétique. On parle donc bien d’indépendance.
Dans sa lettre au picrate, Bart De Wever met les échecs passés sur le dos des Francophones, qui étaient « dans un fauteuil » lors des réformes de l’État précédentes, selon lui. Ils auraient été aidés par une Constitution « verrouillée » et par des vétos. Cette façon de présenter l’ethnie honnie comme plus maline et plus forte est un grand classique du nationalisme, c’est ce type de discours tenu alors par Milosevic qui avait mis le feu aux poudres yougoslaves.
Et bien sûr, selon Bart, la dernière réforme a tout rendu plus complexe (sur ce point, on ne peut pas lui donner tort) et coûté « des paquets d’argent à la Flandre sans lui apporter une réelle autonomie. » Sachant que l’Open VLD et le CD&V ont voté pour, la claque de Bart aux autres partis flamands de la coalition est retentissante, mais ils s’y sont habitués.
Vient ensuite la litanie du « château-fort socialiste » que la N-VA a assiégé pour rien pendant 541 jours, « jusqu’à ce que les autres partis flamands cèdent [avec pour résultat] une réforme dramatique et un gouvernement PS dominé (sic) par les Francophones (sic) qui a mené une gestion désastreuse pour la Flandre. » Et à ceux qui pensent que le PS est la vraie cible, De Wever y associe encore, sans hésiter, « les Francophones » qu’il faut « mettre en position demandeuse » et « faire sortir de leur trou ». Plus lourd encore pour la position du MR au gouvernement, Bart écrit que Laurette Onkelinx a raison de parler de « flamandisation » au fédéral, faisant passer Charles Michel et son parti pour un traître à la francophonie — car dans son esprit, on ne peut être que l’un ou l’autre.
Si Bart le dit, tout l’indique : la N-VA n’a pas perdu un iota de sa fibre nationaliste. Tout y est toujours pour la Flandre, rien que pour la Flandre, et pour les Flamands. Le sort des autres Belges n’a pas le moindre intérêt. Pire : dès qu’on s’en soucie (comme le CD&V ou l’Open VLD), on passe pour un traître à la cause flamande. De quoi montrer que l’électeur soi-disant non nationaliste qui serait si nombreux à choisir la N-VA n’est qu’une vue de l’esprit. Car même si 89 % des électeurs bartiens ne s’intéressent pas directement à la Republiek flamande utopique (ou non), la fibre « flamande » est en eux, ne fut-ce que parce qu’ils ont été convaincus que la gestion francophone est différente de la flamande, et qu’elle lui est même nocive. Remplacez Flamands et Francophones par Serbes et Croates, on comprend mieux.
Les reproches faits au PS et, à travers lui, à la Wallonie et à Bruxelles, de pomper l’argent des Flamands, relient clairement ce nationalisme ethnique et identitaire aux thèses « socio-économiques » développées par le parti. Bref, la N-VA ne travaille jamais pour la Belgique, toujours exclusivement pour la Flandre.
Sans nationalisme, plus de N-VA
Préserver l’arrière-ban de la N-VA et éviter de nouvelles défections est certes une raison d’affirmer son caractère nationaliste. Mais que croyez-vous ? Qu’un parti qui compte parmi ses pontes les deux grands animateurs du Vlaamse Volksbeweging (Jan Jambon et Peter De Roover, respectivement vice-premier ministre et chef de groupe à la Chambre), qui n’a jamais hésité à célébrer les pires collaborateurs, voire les pires nazis, pour chanter la Flandre autonome, peut même envisager de changer de nature ? Non, il peut tout au plus tenter de se départir de ce sparadrap de l’ordre nouveau en effectuant un virage rentrant démocrate.
Si la N-VA reniait le nationalisme, elle perdrait donc sa nature et finirait par s’évaporer, comme ce fut le cas de la Volksunie quand il se mit à trop « coopérer » avec la Belgique honnie. Et ses électeurs si peu indépendantistes ? Au minimum, ils ne sont pas dérangés par son profil ethnique et nationaliste, tout comme ceux du Vlaams Belang en 2004 (24 % des électeurs flamands) n’étaient pas dérangés par son fascisme et son racisme. Mais bien entendu, ils attendent nettement plus d’un parti politique qu’une simple idée nationale. Le génie de Bart De Wever est d’avoir « rempli » les cases manquantes du programme par le socio et l’économique. La rencontre entre lui et l’électorat de droite s’est conclue parce qu’ils partageaient un goût prononcé pour le conservatisme rigide et autoritaire.
Quant à l’ADN, face à la nécessité de contenter des électeurs pas forcément ou pas uniquement nationalistes, les ténors du parti se répartissent les rôles. Ainsi, Jan Jambon rappelle régulièrement que la Republiek Vlaanderen est la raison d’être du parti. Mais c’est à moyen terme. Siegfried Bracke répète tout aussi régulièrement que l’important, c’est le socio-économique. Tout en rappelant que lui aussi rêve d’indépendance — mais les rêves, c’est du long terme. Les leaders Geert Bourgeois et Bart De Wever unifient le message, comme le dernier l’a fait au micro de la VRT le weekend dernier. Je résume et traduis : « le programme N-VA est toujours le même, il est nationaliste et séparatiste, mais en 2019, on verra quelle partie de ce programme on appliquera (avec le MR) ; si jamais on m’imposait une négociation avec le PS, ah ! malheur ! je serai obligé de mettre tout le bazar sur la table. »
Pire : si la N-VA ne prévoit plus l’indépendance ou la république flamande à court terme, le confédéralisme n’est rien d’autre qu’une indépendance impérialiste. Dans cette perspective, les autres entités de la Belgique sont mises au service de la Flandre, la partie richissime du pays. Elle peut donc dicter ses conditions à l’autre partie, exsangue. Et elle ne reconnaît pas à Bruxelles, pourtant région à part entière, le droit de choisir son destin : elle sera, dans le plan N-VA, une capitale partagée. Sachant que c’est le moteur économique du pays, on peut se demander qui prendra la meilleure part de ce gâteau-là. En général, c’est le plus riche.
Impérialisme et autoritarisme, encore, quand Bart ne se gêne pas pour influer sur les choix des électeurs wallons par un chantage radicalement antidémocratique. C’est « soit, vous votez MR, soit je fais péter le bazar et vous n’aurez plus rien ». Il faut considérer son « peuple » comme immensément supérieur pour s’autoriser une telle dialectique. Mais cette attitude musclée séduit son public antisocialiste voire antifrancophone. De quoi rappeler à ceux que la méthode socioéconomique de Bart fascine au Sud du pays qu’ils ne sont pas concernés par le formidable progrès qu’il veut offrir, exclusivement, aux Flamands.
Parti normal ? Il fallut que Bart le Vuye
Le départ d’Hendrik Vuye et de Veerle Wouters n’est donc pas un tremblement de terre. Ils ne sont pas partis parce que la N-VA était devenue trop peu nationaliste, mais parce qu’ils avaient une vision différente des étapes vers ce confédéralisme. Et probablement parce que ce sont des francs-tireurs mal à l’aise dans une discipline de parti.
L’erreur du professeur namurois (eh oui, il enseigne en français et est donc rémunéré par… la Communauté française) est aussi de ne pas avoir compris ou admis la différence entre un programme et le jeu politique. Formé par Hugo Schiltz, Bart De Wever a au contraire très bien assumé la différence entre vouloir quelque chose et obtenir des avancées décisives vers cette chose par la participation démocratique. Autrement dit, il sait attendre et faire patienter. Hendrik Vuye était peut-être trop pur pour lui. Et trop peu discipliné.
Contrairement au Vlaams Belang, qui n’a jamais participé au pouvoir (même s’il a influé sur l’évolution de la politique flamande, notamment en capturant un quart des électeurs, ce qui a forcé les autres partis à vlaamsbelangiser légèrement leurs programmes), De Wever a compris que pour être un grand parti, et pour rester dans les mémoires, il fallait participer activement. Rester dans les mémoires ? Oui : si Bart se compare à Jules César ou à Auguste, c’est parce qu’il veut marquer l’histoire du mouvement flamand.
Son parti a donc siégé dès 2004 au gouvernement flamand (à travers le cartel avec le CD&V d’un certain Yves Leterme). Ensuite, la N-VA est une première fois « montée » dans un gouvernement fédéral dès décembre 2007. Certes, elle n’a pas eu de portefeuille dans ce gouvernement de transition Verhofstadt, ni dans le suivant (Leterme I), mais elle faisait partie de la majorité parlementaire. Une position très inconfortable qu’elle quitta dès le 22 septembre de l’année suivante, rompant alors le cartel avec le CD&V. Puis, à l’été 2014, ce fut l’arrivée de la Suédoise, avec le MR en position kamikaze.
Kamikaze nordique
La surprise fut grande (y compris pour moi). Pourtant, a posteriori, la logique est limpide : quand on a des électeurs qui veulent à tout le moins plus d’autonomie pour la Flandre, qu’une séparation entraînerait le départ de l’Union européenne (et des années avant de re-rentrer), et que Bruxelles serait presque à coup sûr perdue pour la Flandre, le seul moyen d’obtenir une meilleure situation économique — à défaut d’un surcroît d’autonomie — pour les Flamands est évidemment de participer au gouvernement fédéral. Parce que fondamentalement, la raison pour laquelle l’électorat N-VA veut plus d’autonomie, c’est pour améliorer le rendement de l’argent flamand au sein de la Belgique (ou pas), autrement dit, pour s’enrichir et cesser de payer pour les Wallons socialistes, paresseux et incapables. Ethnocentrisme et individualisme, donc. C’est le sens du programme « socio-économique », fer de lance de Bart. Et celui-ci ne se gère que partiellement depuis la place des Martyrs, siège du Vlaamse Regering. Il fallait donc aller un pas plus haut. Occuper le pouvoir fédéral pour mieux le grignoter. Il aura fallu attendre 2016 pour qu’il le dise aussi clairement.
Ce faisant, Bart De Wever se réaffirme comme l’homme fort du parti fort de la coalition gouvernementale : il peut encore et toujours absolument tout se permettre, ratiboiser le MR en attaquant les Francophones de front, humilier ses concurrents flamands en les accusant d’être au service de la Wallonie et de Bruxelles. Sans la moindre réaction ou presque. De quoi prédire que la campagne pour les élections communales de 2018 sera sanglante ou ne sera pas.
Bart De Wever : du national-fascisme au national-conservatisme ethiquement progressiste.
Depuis sa fondation sur les ruines de la Volksunie, la N-VA a toujours été un parti nationaliste. C’est le premier point de ses statuts : l’établissement d’une république flamande. C’est du reste le combat de Bart De Wever depuis sa plus tendre enfance. Son idéologie personnelle de départ semble reposer sur deux fascinations de l’Auguste Anversois (Auguste comme l’empereur qu’il admire, pas comme le clown du même nom) : la république flamande indépendante, d’une part, un néoconservatisme basé sur l’idée de révolution conservatrice des jeunes-conservateurs de la République de Weimar, de l’autre.
Comme Bart aujourd’hui, les jeunes-conservateurs considéraient les patrons et les entrepreneurs comme la nouvelle aristocratie (« Mon patron, c’est le VOKA »), ils s’opposaient aux Lumières qui avaient, selon eux, détruit le Volk allemand (Bart pense que les Lumières nuisent à l’identité). Ils encensaient le volontarisme, qui est par exemple le cœur même de la campagne N-VA « Helfie » (qu’on pourrait traduire par « Coup de pouce ») qui préfigure le remplacement de l’État par l’entraide volontaire.
Si ces jeunes-conservateurs sont considérés par certains comme la pépinière du nazisme, seules certaines de leurs idées se sont retrouvées dans le programme du jeune Hitler et de sa clique, avec lesquels les disciples de la révolution conservatrice ne partageaient pas grand-chose, sinon un volkisme national et le rejet du socialo-communisme et des Lumières. Mais ils préfiguraient autant Hayek ou Margaret Thatcher. D’éducation notoirement fasciste et nationaliste, Bart De Wever a fortement évolué, et cherché à extraire les éléments nocifs des deux idéologies, obsédé par la recherche d’un nationalisme et d’un conservatisme démocrates.
Ainsi, dans L’Ombre du Leader, son ode pseudo-historique de 2001 au premier fasciste flamand Joris Van Severen, De Wever évite de le qualifier de fasciste, attribuant à son mouvement pourtant violemment antisémite et mussolino-hitlérien, le VERDINASO, un simple conservatisme catholique, et une proximité des jeunes-conservateurs allemands des années vingt.
Si on peut voir dans cette erreur flagrante d’historien une manière de décriminaliser le facho-nazisme du nationalisme flamand d’avant-guerre, on peut aussi y percevoir le besoin de se débarrasser des oripeaux désagréables à l’odeur rance et cadavérique qui précède une recherche originale — la voie vers un nationalisme conservateur « démocratique ». Cette originalité que le jeune De Wever reconnaissait lui-même à Joris Van Severen, inventeur du « national-solidarisme ». Il a notamment brillamment réussi à extraire du conservatisme sa dimension éthique : la N-VA est à la pointe sur les dossiers du mariage gay et de la protection des LGBT.
Mais ce qu’il résume aujourd’hui comme un confédéraliste de centre-droit reste un nationalisme conservateur qui privilégie ses élites dont il entend établir et ensuite conserver les privilèges. Au détriment des faibles, de l’État-social (que certains appellent « État providence »), des différents (zazous, fafouls et autres artistes) et de tout ceux qui ne se reconnaîtraient pas dans l’identité flamande qui, elle, n’a pas attendu l’indépendance pour naître, exister et s’affirmer.
Enfin, Bart De Wever a compris qu’il ne suffit pas d’avoir un programme, il faut aussi que son application soit suffisamment souple pour répondre aux angoisses du peuple et que son évolution s’attache à coller le mieux possible à la peau du Volk, à la traduction factuelle de son identité en l’occurrence. Et la N-VA a réussi à transformer son national-conservatisme théorique en un ensemble de réponses au buikgevoel (les tripes) flamando-flamingant.
Ce faisant, il a converti son nationalisme théorique en discours populaire et capturé le Volk flamand de centre-droit. Mieux que quiconque avant lui — et ayant lu l’historien tchèque spécialisé en nationalisme Miroslav Hroch — Bart a compris que le nationalisme seul ne passionnerait pas les foules. Il fallait lui donner un contenu. Autrement dit, comme on dit dans la com, l’articuler pour répondre à la question fondamentale de l’électeur : « what’s in it for ME » (qu’est-ce que vous allez faire pour MOI ?) Ce faisant, Bart De Wever a réussi à faire de la N-VA le grand parti populaire flamand, à la place du CD&V. Populaire, oui. Mais aussi parce que… nationaliste !
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(1) Met dank aan Lieven voor vermelding van een valse link.
26 Comments
Salade
septembre 23, 13:31Mereck
septembre 23, 13:41vince001
septembre 23, 14:59Fernando Ferreira
septembre 23, 17:24moinsqueparfait'
septembre 24, 09:05Salade
septembre 24, 11:10Degenève
septembre 24, 13:12Salade
septembre 24, 21:42Pfff
septembre 24, 13:27marcel
septembre 25, 09:34lievenm
septembre 25, 13:57Franck Pastor
septembre 26, 11:16marcel
septembre 26, 12:18lievenm
septembre 26, 13:19marcel
septembre 26, 13:27Fernando Ferreira
septembre 26, 15:44Eridan
septembre 26, 14:29Salade
septembre 26, 18:32moinsqueparfait'
septembre 26, 20:46Rivière
septembre 26, 18:45Wallimero
septembre 26, 20:29Turbulences à la N-VA | Alliance Wallonie France
septembre 27, 10:51SamuelB
septembre 27, 13:47MUC
septembre 27, 22:30marcel
octobre 02, 13:54moinsqueparfait'
septembre 29, 12:19