Disney cesse de vous juger. Une victoire facile concédée par les démocrates à Donald Trump.

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Ce n’est peut-être pas grand-chose pour vous, mais pour moi, ça veut dire beaucoup.

 Selon Variety, Disney + a décidé de modifier l’avertissement publié au début de certains dessins animés, comme Dumbo ou Peter Pan. Et la raison apparente, c’est l’arrivée au pouvoir de Donald Trump.

Désormais, l’avertissement pose simplement — comme il le faisait déjà avant 2020 — « Ce programme est présenté dans sa version originale et peut contenir des stéréotypes ou des présentations négatifs. »

Exit donc la longue litanie qui, depuis 2020, introduisait — par exemple — Dumbo : « Ce programme contient des présentations négatives et/ou de la maltraitance [mistreatment] de peuples ou de cultures. Ces stéréotypes étaient fautifs à l’époque et sont toujours fautifs aujourd’hui. Plutôt que de retirer ce contenu, nous désirons reconnaître leur impact nocif, en tirer les enseignements et susciter le débat pour créer un avenir plus inclusif ensemble. Disney s’engage à créer des histoires avec des thèmes inspirants et ambitieux qui reflètent la riche diversité de l’expérience humaine autour du globe. » (ma traduction) 

 

L’autonomie rendue au spectateur

On notera que ni l’avertissement ni la reconnaissance d’un aspect négatif n’ont été retirés. Ce qui a changé, c’est que Disney ne se pose plus en juge de ses productions anciennes, poussant le mea culpa jusqu’à en faire un argument commercial, et rend son autonomie intellectuelle au spectateur.

Il avertit toujours que le film a une histoire et qu’il contient des stéréotypes d’époque à remettre en contexte. Mais il purge sa politique de diversité de son aspect le plus dangereux : le jugement. Parce que ce n’est pas le rôle des artistes ou des producteurs de s’ériger en juges de la création, encore moins des partis politiques ou d’une marge intellectuelle. C’est le rôle des tribunaux.

Les autres — tous les autres — peuvent évidemment librement commenter, débattre, émettre des opinions, injurier même. Mais le jugement doit être réservé à la justice, même faillible, parce que rien n’est plus dangereux que des idéologues qui imposent leurs critères aux masses dans un tribunal médiatique continu qui condamne trop souvent à tort et ne blanchit jamais ses victimes lorsqu’il est patent qu’elles étaient innocentes.

Ce n’est pas pour rien qu’on fustige encore aujourd’hui les procès hitlériens ou staliniens, qui n’étaient pas judiciaires, mais bien idéologiques et dictatoriaux.

 

Une victoire de Trump…

Le problème, c’est qu’il a fallu que Donald Trump soit élu, avec sa queue de comète qui comprend autant de naïfs, de personnes trop sensibles à son invraisemblable démagogie, que de véritables thuriféraires d’extrême droite, y compris en Europe.

Ceci révèle l’abandon et la lâcheté des acteurs intellectuels et politiques de gauche démocrate et du centre qui ont complaisamment laissé le champ libre au wokisme et à sa volonté d’imposer ses normes intersectionnellesà l’ensemble de la société. Pourtant, l’association ahurissante du marxisme qui s’en est réclamé et de son antithèse absolue, soit la religion dans son interprétation radicale, était un signe indéniable de perversion idéologique et démagogique. Un signal d’alarme que nul démocrate, a fortiori de gauche, n’aurait dû laisser passer.

La gauche démocrate ne pouvait pas ignorer les signes que le wokisme plaçait comme des bornes sur sa route : procès immédiats, dénis de justice, antisémitisme, association avec divers extrémismes qui n’ont rien à envier à l’extrême droite européenne « traditionnelle ». L’islamisme est une extrême droite aussi. Mais plus on le faisait remarquer aux wokistes, plus ils criaient « facho, nazi, halte au fascisme » !

Les vieux gauchistes, qui ont eu vent de la Révolution culturelle et se souviennent très bien de la manipulation maoïste des foules, s’en sont moins laissé compter. Ils ont été mis de côté dans le placard « boomer ». Ironie de l’histoire : c’est exactement ce que faisaient les gardes rouges avec les anciens qui auraient pu partager leur expérience avec les jeunes. Mais les partis, singulièrement à gauche, se sont laissé paralyser, si pas envahir, par ce chantage idéologique : « soit vous êtes avec nous, ou au minimum, vous nous laissez faire, soit on va vous fasciser dans des jugements immédiats et solennels. »

 

… concédée par les démocrates

Ces concessions lamentables, en même temps que l’offensive néofasciste contre le wokisme, ont offert une victoire facile à l’extrême droite (quelle qu’en soit la définition) et au néoconservatisme. Alors que c’était aux forces démocrates de révéler les tares des mouvements décoloniaux et intersectionnels — qui constituent concrètement « le wokisme » tel que je l’ai défini ici —,  les citoyens américains et européens constatent aujourd’hui que c’est au contraire l’avènement de Donald Trump qui les libère brusquement de la suspicion permanente (« tout le monde il est raciste, tout le monde il est misogyne, sauf ceux qui se soumettent à notre doxa »), cette machine à subjuguer le citoyen pour lui imposer, au mieux, l’adhésion à la nouvelle idéologie, sa novlangue et sa victimisation sélective, au pire, la soumission à ces nouveaux standards.

La leçon vaudra bien un fromage, j’imagine : si l’on est puéril au point d’être terrifié « qu’on » puisse penser qu’on a un combat en commun avec « le fascisme » contre un autre fascisme, on laisse le vieux fascisme mener seul le combat contre le nouveau. Et à l’arrivée, on finit toujours avec un fascisme.

Je sais, cette phrase est compliquée…

Alexis de Tocqueville a mieux formulé ça, quoique dans un autre contexte, et je recommande à tous ceux ont préféré regarder passer ce combat sans réagir de ruminer ce constat à l’infini : « Ce qui met en danger la société, ce n’est pas la grande corruption chez quelques-uns ; c’est le relâchement de tous. »

 

Tant que vous êtes là…


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